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C‘est du jamais vu depuis la création des Jeux Olympiques *. Et pourtant, le CIO (comité international olympique) s’apprête à annoncer la semaine prochaine le décalage d’une année de la tenue des XXXIIIè Olympiades à Paris. En quelques semaines, la France a convaincu Thomas Bach, président du CIO et ses équipes, qu’une telle décision s’imposait. Les deux principaux arguments avancés par l’Elysée et la mairie de Paris sont les suivants:
- La plupart des infrastructures de transport ne seront pas prêtes. Malgré les annonces récentes du Premier ministre, les lignes promises ne pourront être exploitées à l’été 2024. «Sans desserte de qualité, pas de JO!», a convenu Thomas Bach. La promesse de CDG Express ne suffit pas.
- Une année supplémentaire permettra d’éviter l’accumulation des déficits. Dans un rapport remis au gouvernement la semaine dernière, les surcoûts évalués pour la construction des sites nouveaux atteignent déjà 500 millions d’euros: ils risquent d’être multipliés par la pression du calendrier, sans parler de la facture finale du Grand Paris Express. Bercy, qui ne veut pas que soient gâchés les efforts de réduction des déficits publics, a donc convaincu de retrouver un peu de raison sur le dossier. Paris 2024 ne sera pas Athènes 2004!
Selon nos informations, Emmanuel Macron et Anne Hidalgo ont trouvé cette solution politique à leurs intérêts politiques respectifs: qu’on se le dise, ils ne sacrifieront pas la France et les Français sur l’autel des JO.
Pour le président de la République, qui se voit rempiler pour un deuxième mandat, la double perspective des retards et d’une déconfiture financière du Grand Paris Express est difficilement supportable, alors que tout porte à croire que les travaux qui ne font que débuter un peu partout en Ile-de-France vont déjà suffisamment alimenter la colère des voyageurs du quotidien. Il sculpte ainsi son image d’homme d’Etat courageux et pétri d’autorité: il a fait plier le CIO!
Pour la maire de Paris, cette année gagnée sur le calendrier doit lui permettre de montrer son sens des responsabilités, alors que les critiques pleuvent depuis des mois sur sa gestion des affaires municipales. Elle aurait dû donner trois mois de plus à Velib 2, ce qui aurait évité le désordre actuel. Forte de la mésaventure, elle accorde un an de plus à Paris 2024!
Enfin, car les responsables politiques ont cette faculté d’agglomérer tous les avantages d’une décision difficile, cette année supplémentaire devrait permettre à la ministre des Transports Elisabeth Borne de terminer son processus de concertation avec les syndicats cheminots, au terme de 834 réunions de travail. «Voilà un mois d’avril qui commence superbement!», aurait-elle avoué hier, soulagée, à ses équipes.
* Seuls les deux conflits mondiaux de 14-18 et 39-45 ont interrompu le calendrier régulier des quatre années d’alternance des Jeux Olympiques. «Nous rentrons donc encore un peu plus dans l’Histoire», aurait sobrement commenté Emmanuel Macron.