Vélo en ville: le classement des cyclistes
Grenoble surpasse Strasbourg, Paris cartonne, Bordeaux rétrogradée… A quelques semaines des élections municipales, le palmarès de la FUB réjouit les uns et affecte les autres. Le Midi, de Perpignan à Nice, reste sinistré. Mais la situation s’améliore dans de très nombreuses métropoles.
Evolution de la situation pour les cyclistes depuis 2017, sur la base de la question: «Dans ma ville, depuis deux ans, la situation des cyclistes s’est: fortement dégradée (-2), dégradée (-1), stabilisée (0), améliorée (+1), fortement améliorée (+2)».
Grenoble pédale désormais plus vite que Strasbourg. La « capitale des Alpes » devance la ville alsacienne sur le podium des municipalités les plus favorables aux déplacements à vélo, d’après les usagers eux-mêmes. Le palmarès de la Fédération des usagers de la bicyclette (FUB), basé sur une enquête à laquelle 185000 réponses ont été enregistrées, a été présenté au public à Bordeaux, ce 6 février à 19h30, à l’occasion du congrès annuel de l’organisation.
Les résultats de la version 2019 du «Baromètre» consacrent les efforts de l’équipe de l’écologiste Éric Piolle à Grenoble
Très attendus par les maires sortants, et par leurs adversaires, les résultats de la version 2019 du « Baromètre » consacrent ainsi les efforts de l’équipe de l’écologiste Éric Piolle : Grenoble obtient une note globale de 4,12/6, contre 4,02 pour Strasbourg, où le réseau Vélostras promis en 2013 peine à voir le jour. La ville alsacienne demeure toutefois en tête du palmarès dans la catégorie des villes de plus de 200000 habitants.
D’autres maires vont se réjouir de ce classement, à commencer par celle de Paris, Anne Hidalgo (PS). La capitale enregistre en effet la plus forte progression depuis la précédente version. Classée septième sur onze dans sa catégorie en 2017, Paris est désormais quatrième. La ville fait aussi partie des rares, avec Grenoble ou La Rochelle, que les usagers gratifient d’une « forte amélioration » des conditions de circulation à vélo depuis deux ans. Les pistes cyclables bidirectionnelles parisiennes, visibles et très empruntées, ont manifestement produit leur effet.
En bas du classement, Montpellier est la seule grande ville où la situation s’est légèrement détériorée depuis 2017
Sur le podium des grandes villes, Bordeaux cède la place à Rennes, où la métropole s’est dotée d’un « réseau express vélo » au cours du mandat. Nantes maintient en revanche sa deuxième position, malgré les critiques de l’association locale Place au vélo à l’égard de la politique de la maire sortante, Johanna Rolland (PS). En bas du classement, Montpellier est la seule grande ville où la situation s’est légèrement détériorée depuis 2017. La « vélorution » revendiquée par le maire Philippe Saurel (DVG) n’a pas réussi à convaincre.
Parmi les résultats remarquables, on note, dans la catégorie des villes de 50000 à 100000 habitants, la troisième place de Dunkerque (Nord). La collectivité, à laquelle les usagers attribuent une « forte amélioration », a institué en septembre 2018 la gratuité des transports publics, assortie d’une refonte du réseau. Si plusieurs études affirment que la fréquentation des bus gratuits progresse au détriment du vélo et de la marche, les cyclistes dunkerquois ne semblent pas en tenir rigueur à la municipalité.
Comme en 2017, ce sont les villes de l’ouest (La Rochelle, Angers, Lorient), celles du piémont alpin (Chambéry, Annecy, Bourg-en-Bresse), d’Alsace (Sélestat, Illkirch, Obernai) ainsi que quelques cités balnéaires aménagées pour le cyclotourisme, qui récoltent les meilleures notes.
Le Midi s’en sort beaucoup moins bien. De Perpignan à Nice, en passant par Béziers, Nîmes, Toulon ou Antibes, et bien sûr Marseille, les cyclistes se sentent très peu pris en compte. Les villes de banlieue parisienne présentent des situations contrastées, indépendamment de leur couleur politique. Sceaux (UDI), Versailles (LR) ou Malakoff (PC) font la course en tête, loin devant Levallois-Perret (LR), Aubervilliers (PS) ou Chatenay-Malabry (LR), où le maire a refusé le service Vélib’.
Les données du Baromètre, consultables en ligne sur le site parlons-velo.fr ne se limitent pas au palmarès. En répondant à une trentaine de questions chacun, les participants fournissent aux urbanistes, aux techniciens et aux chercheurs des données précises qui permettront d’aménager la ville pour faciliter les déplacements à vélo.
Exclusif
Vélib 2:
les faiblesses d’Anne Hidalgo
La reprise du service de vélo en libre service par Smovengo n’est pas seulement un échec industriel et commercial; elle s’accompagne d’une négociation des pénalités très éloignée des critères définis dans le contrat. Mobilettre révèle les chiffres d’un énorme gâchis au détriment des collectivités franciliennes.
D’abord les chiffres de l’échec: moins de deux tiers du nombre de vélos prévus étaient effectivement déployés en décembre (13000 contre 19000 selon Smovengo, voire un peu plus de 11000 si l’on soustrait les vélos inutilisables – non loués trois jours de suite). Selon plusieurs sources, y compris les données Smovengo, la situation s’est même encore détériorée en ce début janvier: on descendrait largement sous les 10000 vélos disponibles.
Le fait de ne pas atteindre les critères définis dans le contrat est logiquement passible de pénalités, dont le calcul est précisé dans l’annexe 1 du programme fonctionnel. Vingt-cinq clauses justifient l’application de ces pénalités cumulables; un barème à huit niveaux (de 100 euros HT à 1 million d’euros HT) est fixé en fonction de l’importance des lacunes. Ainsi, le non-respect du nombre de vélo-stations opérationnelles, au-delà de 200 stations manquantes, est pénalisé d’un million d’euros, quand celui du pourcentage de VAE (les modèles électriques) est de niveau 6 – soit 20000 euros HT, par mois et par point de pourcentage en dessous du seuil de conformité. Bref, tout est prévu.
Du coup, l’estimation des pénalités est assez facile. En se limitant aux deux clauses les plus importantes (les stations manquantes et les vélos par station), la facture pour 2019 dépasse les 19 millions d’euros – auxquels il faudrait donc rajouter les pénalités relatives aux 23 autres clauses…
Oui mais voilà, SMAVM (le Syndicat Mixte Autolib Vélib Métropole) a préféré négocier un protocole transactionnel… juste avant l’ouverture de la campagne électorale des municipales. Car depuis des mois, Smovengo multipliait les contestations-réclamations, allant même au recours devant le Tribunal administratif. Les deux parties renoncent donc à tout contentieux ultérieur sur le montant 2019 du marché (30,5 millions d’euros HT) et sur le montant des pénalités, réduit à… 4 millions d’euros (contre une estimation a minima à 19 millions d’euros)!
Déjà en 2018, les pénalités estimées à 24 millions d’euros avaient été ramenées à 8 millions d’euros. Un an après, la «ristourne» est tout aussi violente. Anne Hidalgo a-t-elle craint que Smovengo ne jette l’éponge à quelques semaines des élections, ce qui aurait spectaculairement renforcé les critiques sur sa gestion du dossier Vélib et plus généralement sur ses capacités de gestionnaire des deniers publics?
Au-delà d’un soutien très coûteux – et très discutable – à un opérateur très déficient dans l’exploitation du service qui lui a été confié (les détériorations consécutives au mouvement des gilets jaunes n’excusent pas tout, loin de là), les chiffres des recettes usagers confirment également l’étendue de l’échec: en 2019 leur montant s’est élevé à 10,4 millions d’euros, alors que si l’on se réfère à l’audit de l’inspection générale de la ville de Paris en 2016, elles atteignaient entre 16 et 18 millions d’euros à la fin des années dites JC Decaux.
Le chiffre de 340000 abonnés avancé par Anne Hidalgo lors du Grand Oral Vélo du 29 janvier (lire Mobitelex 283) est quant à lui trompeur, car il considère comme abonné tout usager, y compris celui n’ayant eu recours qu’une seule fois au service.
Alors que les associations pro-vélo louent fort justement la construction de nombreuses pistes cyclables bi-directionnelles à Paris (lire ci-dessus), Vélib 2 constitue un accroc très important pour la maire sortante. En négociant un accord très favorable à Smovengo, elle a gagné le temps d’une campagne électorale. Mais pour le prochain locataire de l’Hôtel de Ville, que ce soit elle ou un(e) autre, il ne s’agira plus de gagner du temps, mais bien de normaliser une situation devenue anormale du point de vue de la bonne gestion des deniers publics.
FERROVIAIRE
Le Président de SNCF Réseau échappe au contrôle du Parlement
C’est sans véritable surprise (lire Mobitelex 282) que la commission mixte paritaire (CMP) du Parlement n’a pas retenu le président de SNCF Réseau parmi les personnalités dont la nomination devait être approuvée par les commissions parlementaires compétentes (art.13 de la Constitution). Les dés étaient pipés dès le départ: les cinq sénateurs ont eu beau faire valoir que le rôle de SNCF Réseau dans la perspective de l’ouverture à la concurrence et la nécessité de garantir l’indépendance du gestionnaire d’infrastructure justifiaient que l’on maintienne le contrôle du Parlement sur sa nomination. Comme l’a confirmé à Mobilettre l’ancien ministre Jean-Pierre Sueur, vice-président (PS) de la Commission des Lois, leurs cinq collèges députés, sans avancer de justification, ont refusé ce maintien, relayant à l’évidence un refus de la direction de la SNCF et du gouvernement. Seul le directeur général du groupe public SNCF sera donc soumis aux auditions de l’article 13. Pour garantir l’indépendance de SNCF Réseau, il n’y a plus qu’à compter sur l’ART (Autorité de régulation des transports).
La CGT s’oppose à l’accord sur les classifications et rémunérations
Dans une lettre adressée au président de l’UTP Thierry Mallet, le secrétaire général de la CGT Cheminots Laurent Brun détaille les raisons pour lesquelles son organisation s’oppose à l’accord sur les classifications et rémunérations signé par l’Unsa et la CFDT: un système de classification opaque et subjectif, des déroulements de carrière trop contraints, des augmentations de salaires pour ancienneté insuffisantes…
Même si le débat sur l’opportunité de s’abstenir agite ses représentants, il est probable que Sud-Rail adopte la semaine prochaine la même position, qui est motivée en premier lieu par des considérations d’ordre politico-tactique. Encouragée par la détermination des grévistes durant le conflit sur la question des retraites, la CGT n’entend pas relâcher la pression, d’autant plus que son homologue à la RATP, l’Unsa RATP, promet un lundi noir le 17 février prochain.
Cette décision de la CGT marque une rupture dans le long cycle de négociation des différents modules de la convention collective de branche, alors qu’il reste encore plusieurs points essentiels au programme: la prévoyance, les garanties sociales pour le personnel transféré, les moyens alloués aux syndicats de la branche. Le gouvernement, de par une disposition insérée dans la LOM (loi d’orientation des mobilités), a quinze mois, jusqu’au printemps 2021, pour éventuellement légiférer par ordonnance sur cette question des classifications et rémunérations – à défaut de texte, c’est le seul code du travail qui s’appliquerait en couche réglementaire. Mais la perspective de se retrouver seul en première ligne face aux syndicats sur cette question des rémunérations a toutes les allures d’un nouveau piège politique. Comment faire pour relancer une négociation de branche aux conditions de la CGT?